•  

    Fleur de Nuit s’étira sans ouvrir les yeux.  Elle trouvait  son nid très inconfortable, rien de comparable à son habituel tas de mousse. L’air aussi semblait différent.  Et au lieu des miaulements habituels, on entendait des bruits sourds.

    La guérisseuse ouvrit les yeux. Elle faillit bondir en voyant le spectacle qui s’offrait à elle.  Elle n’était pas dans la forêt mais dans un endroit clos. Elle se releva et se rendit compte qu’elle était dans un nid de Sans-Queue. Elle observa les alentours. Elle remarqua aussitôt une ouverture dans les murs du nid. Elle se précipita en courant vers l’ouverture mais au moment où elle voulut sauter, une crampe à l’estomac la rattrapa et la plaqua au sol. Elle se crispa, son ventre était soudain très douloureux. Le souffle court elle regarda aux alentours dans l’espoir de trouver une quelconque plante pour l’aider à surmonter sa douleur. Mais elle ne remarqua rien.

    Soudain un bruit sourd se fit entendre. Un long morceau de bois, trop lisse  et trop plat pour être un arbre s’ouvrit. Un Sans-Queue apparut. Le morceau de bois se referma derrière lui. La guérisseuse se plaqua au sol en poussant une longue plainte en voyant la créature approcher. Il avait un étrange objet dans une patte. Il précipita son autre patte vers la petite chatte noire et la souleva dans les airs. Paniquée, le souffle coupé, la femelle se débattit en miaulant gravement.

    << Lâche-moi sale chose ! >> cracha la guérisseuse.

    Le Sans-Queue grommela quelque chose que Fleur de Nuit ne compris pas. Cependant, elle cessa de gigoter et se laissa faire. Le Sans-Queue la reposa sur un objet blanc et lisse en hauteur. Il déposa une sorte de pierre creuse juste à côté d’elle, puis, s’éloigna. Fleur de Nuit s’approcha de l’étrange objet, un liquide blanc et lisse était déposé dedans. Son odeur était douce et rassurante.  La guérisseuse hésita un instant à goûter : elle avait entendue des anciens raconter que les Sans-Queue déposaient parfois d’étranges liquides verdâtres dans la forêt qui rendaient les chats et autres animaux malades. Cependant ce liquide la était blanc et son odeur incitait à y goûter. Elle lapa une gorgée du liquide. Du lait ! se réjouie-t-elle. La petite chatte noire avala goulûment le reste. C’est délicieux !  

    Fleur de Nuit se retourna pour sortir par l’ouverture – son ventre ne la faisait plus souffrir et le lait lui avait redonné des forces. Mais l’ouverture n’était plus là, on pouvait apercevoir l’extérieur mais s’y rendre était désormais impossible. La femelle au long pelage noire alla se peloter sur sa litière de fortune. Elle soupira, elle ne pouvait pas retourner auprès des siens. Au fond, c’est peut-être mieux comme ça. Je ne sais même pas où je suis, si ça se trouve je suis loin de la forêt. C’est paisible ici. Je vais me reposer quelques jours avant de rentrer.

     

    Fleur de Nuit se réveilla en sursaut. Elle se plia aussitôt en deux. Son ventre lui faisait atrocement mal. Elle était enfermée dans une toute petite pièce presque vide. Elle savait, elle sentait que la mise à bas approchait. 

    Voilà une lune et demi qu’elle était avec les Sans-Queue. Bien que la tribu lui manquait, elle appréciait vraiment la vie ici, elle pouvait passer ses journées à dormir, elle avait à manger dès qu’elle avait faim, à boire même dans les journées les plus chaudes. Elle voulait rester le temps que ces chatons soient assez grands pour faire le voyage, ensuite elle partirait et retournerait dans la forêt.

    La douleur qui transpercait le ventre de la femelle la tira de ses pensées. Elle avait mal partout. Sans herbes ni rien pour calmer la douleur, la guérisseuse se sentait vraiment mal.

    Cela dura presque toute la matinée avant que le premier chaton n’apparaisse. C’était un gros chaton gris  avec de grosses rayures noires et quelques poils tirant sur le brun. C’était le portrait craché de son père, Plume Sombre, mise à part que sa fourrure était longue et duveteuse comme celle de sa mère.  Fleur de Nuit se mit à le lécher frénétiquement pour le réchauffer et activer sa circulation. Le deuxième arriva peut après, suivit presque aussitôt d’un autre.

    Fleur de Nuit se retrouva bientôt entouré de trois petites boules de poils. Elle les contempla avec amour. Il y avait deux mâles et une femelle. Les deux mâles se ressemblaient comme deux gouttes d’eau, malgré le fait qu’un ai un pelage court et ras et était tout menu et tout frêle, tandis que l’autre qui avait une belle et longue fourrure semblait déjà costaud comme un apprenti. La femelle avait une belle fourrure écaille sombre, des pattes et des oreilles toutes noires, une queue touffue et de petits yeux jaunes. Elle ressemblait à Fleur de Papillon avec son poil roux feu, noir et beige, même si elle n’avait pas de blanc. 

    Fleur de Nuit était épuisée, cependant elle restait éveillée et regardait tendrement sa progéniture qui tétait déjà.  Soudain un Sans-Queue ouvrit la porte et entra. Il s’approcha, regarda les nouveau-nés puis tendit une main vers Fleur de Nuit. Tandis qu’il lui caressait la tête, elle ronronna. Puis, le Sans-Queue repartit. Fleur de Nuit soupira et posa sa tête au sol. Tandis que les petits se pelotaient contre le giron de leur mère, cette dernière ferma les yeux et laissa le sommeil l’envahir.  Elle était mère maintenant, elle avait hâte que Plume Sombre les voit.

     

    << Tu m’attraperas pas ! >> criai une petite voix aigue.

    Fleur de Nuit écoutait ses petits se chamailler. Ils avaient cinq lunes à présent, mais la guérisseuse aimait tant sa vie ici qu’elle hésitait à retourner dans la forêt. Mais chaque jour elle se posait les mêmes questions : Comment allait Ciel d’Orage ? Fleur de Papillon s’en sortait-elle sans son aide ? Plume Sombre les croyaient-ils morts ? Belle Lune l’a pleurait-elle ? 

    << Hé ! Maman, Gribouille m’a encore piqué la balle ! >>

    Ce cri sortit Fleur de Nuit de ses pensées. La petite femelle écaille se dressait devant elle, la mine triste. Elle vit plus loin Gribouille, le plus petit mâle de la portée qui jouait avec une petite balle rouge. Racaille, le plus imposant des chatons dormait. Elle lécha le crâne de sa fille.

    << Allons ma chérie, au lieu de vous chamailler sans cesse vous devriez vous entraider. Elle se leva et prit la balle entre ses crocs, la déposa devant elle, planta une griffe dans le petit objet et se dressa sur ses pattes arrières tendant la patte aussi haut possible au dessus des chatons.

    << Allez attrapez-la ! >>  leur intima-t-elle.

    Les deux petits sautèrent aussi haut que possible pour l’avoir. Leur frère, réveillé par tout ce boucan se joignit à eux. Ce fut la femelle qui attrapa la petite balle. Aussitôt ses frères se jetèrent sur elle pour récupérer leur butin.

    << Bien joué, Lilas. >> ronronna Fleur de Nuit en regardant ses petits tendrement.

    La guérisseuse ne s’ennuyait pas avec eux. Malgré tout la forêt lui manquait terriblement. Elle n’avait encore jamais parlée à ses petits de la forêt.Elle ne les avait d'ailleurs jamais nommés en tant que chatons, c'étaient les Sans-Queue qui leur avait donné un nom. Elle comptait bien attendre d'être rentrer pour choisir leurs noms avec Plume Sombre. Elle appela ses chatons à se regrouper auprès d’elle.

    << Mes petits, je doit vous parler de quelque chose d’important. >>

    Au même instant, un Sans-Queue apparut. Il déposa une gamelle avec de la pâtée à l’intérieur et une autre avec du lait. Les petits se précipitèrent à ses pieds et se mirent à dévorer le contenu des gamelles. Fleur de Nuit soupira et se rendormit. Elle leur parlerait de la forêt plus tard.

     

    << Fleur de Nuit ! Fleur de Nuit ! >> appela une voix. La guérisseuse ouvrit les yeux. Elle se trouvait dans une vaste clairière. Il faisait nuit.

    << Fleur de Nuit ! >> répéta la voix.

    La guérisseuse se retourna.

    << Fleur Douce ! s’écria-t-elle en reconnaissant la femelle tigrée qui était déjà venue la voir en rêve. Que fait-tu ici ? >>

    L’ancienne guérisseuse s’assis, la queue autour des pattes.

    << Je suis venue t’aider à trouver ta voix.

    - Ma voix ?

    - Oui, tu dois retourner dans la forêt. >> Fleur de Nuit ouvrit la gueule pour répondre quand la femelle argenté la fit taire d’un geste de la queue. << Seule. >>

    Le cœur de Fleur de Nuit fit un bond.  Quoi ! Sans mes chatons ? Hors de question !  avait-elle envie de crier. Mais son respect pour la vieille chatte l’en empêcha.

    << Pourquoi ? Pourquoi mes chatons ne peuvent-ils pas venir avec moi. ?

    - Car ils ont une prophétie à accomplir, et pour cela, ils ne doivent jamais voir le territoire de la Tribu des Ténèbres.

    - Dans ce cas, je reste avec eux ! >> cracha Fleur de Nuit sans hésitation.

    L’ancienne s’approcha d’elle et lui caressa le flanc du bout de la queue.

    << Non. Tu ne peux pas, tu dois retourner auprès des tiens, ils ont besoin de toi. Si tu veux que la prophétie soit accomplie, tu dois promettre de ne jamais chercher à retrouver tes petits. >>

    Fleur de Nuit eut l’impression qu’on lui déchirait le cœur. Non ! C’est hors de question !  eut-elle envie de crier. Elle s’effondra au sol.

    << Et si… si je brise cette promesse ? questionna-t-elle d’une voix faible.

    - Alors le sang et la peur régneront sur les tribus.>> Murmura l’ancienne.

    Fleur de Nuit tremblait de tout ses membres. Elle sentit qu’on lui effleurait le museau et puis plus rien. Seul les ténèbres. Une voix résonnait néammoins dans sa tête. Tandis que tu auras trouvée ton bonheur, un choix va te déchirer. Il te faudra alors choisir et cela aura des conséquences sur la survie des tribus.

     


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      Plume Dorée se prit une grive sur le tas de gibier. Elle s'installa dans un coin pour la manger. L'aube pointait à peine dans le ciel orangé. Pelage de Cendre sortait de la tanière de Fleur de Cerisier. Le coeur de Plume Dorée se serra en croisant le regard de son amie. Celle-ci ne lui avait toujours pas reparlé depuis que Plume Dorée lui avait appris la vérité sur sa naissance. Tant pis pour elle, si elle est incapable d'accepter la vérité, c'est son problème. estima Plume Dorée en mordant dans la chair de l'oiseau.

     

    << Plume Dorée! >>

    Le cri de Reflet de Brume tira Plume Dorée de sa rêverie. La guerrière se tourna vers elle, incrédule.

    << Tu es dans la lune! Réveille toi! fit encore la jeune chatte. Tu es sûre que ça va?

    - Oui, sa va. Désolée. >> miaula Plume Dorée.

    Les deux chattes étaient partis chasser. Mais, Plume Dorée ne parvenait pas à se concentrer. Sa dispute avec Pelage de Cendre la troublait plus qu'elle voulait bien l'avouer. Elle se secoua. Comment être utile à la tribu si elle se laissait aller? Reflet de Brume s'approcha d'elle et lui lécha l'oreille.

    << Je peux te parler? demanda-t-elle.

    - Qu'il y a-t-il? >>

    La jeune chatte blanche et grise s'assis.

    << J'attends des chatons!

    - Vraiment? C'est super! ronronna Plume Dorée. De qui?

    - Flocon de Givre! >>

    Même si elle paraissait se réjouir du bonheur de la jeune chatte. Elle ne peut s'empêcher d'être jalouse. Croc Fauve avait était le mentor de Reflet de Brume.

    << Bon, qu'es ce que vous faites? >> demanda une petite voix.

    C'était Patte de Miel qui revenait d'une course poursuite contre un lapin. L'animal pendait, sans vie, dans la gueule de l'apprentie. 

    << On arrive! >> s'écria Plume Dorée en s'élançant dans les bois.

     

    << Que la Tribu se rassemble pour une assemblée de la tribu! s'écria Ciel de Rêves.

    Plume Dorée qui faisait sa toilette avec Poussière d'Etoile se leva et alla s'asseoir avec les autres. Elle savait ce qui allait se passer, elle en avait parlé avec le chef juste avant qui appelle la tribu. Fièrement, elle regarda Patte de Miel, Patte de Renard et Patte de Lapin se placer au pied de la Surélévation. Elle devina un sentiment de fierté dans le regarde du meneur. C'était son premier baptême.

    << Ces apprentis sont prêt à devenir des guerriers. Patte de Miel! >> reprit Ciel de Rêves.

    L'apprentie au pelage roux tigré s'approcha.

    <<  En ce jour tu reçois ton nom de guerrière. Je te nomme Œil de Miel. Patte de Renard, tu es un chat courageux et puissant. Je te nomme Pelage de Renard. Quand à toi, Patte de Lapin, je te nomme Cœur de Lapin. >> 

    Puis chacun vient féliciter les nouveaux guerriers. Plume Dorée remarqua la fierté qui luisait dans les yeux de Lune de Feu. Pelage de Renard et Cœur de Lapin était ses fils. Sa seule fille, Petite Noisette, était morte de froid, pendant la saison froide. Cela avait était un déchirement pour elle. Œil de Miel vient se frotter contre la chasseuse rousse. Lorsqu'elle était arrivée dans la tribu, Œil de Miel n'était qu'un chaton âgé d'une lune à peine. Lune de Feu l'avait recueillie, et depuis, Œil de Miel la considère comme sa mère, ignorant ses véritables origines et son histoire. Plume Dorée s'approcha de son apprentie. 

    << Sers bien la tribu Œil de Miel! Je sais que tu seras une grande guerrière. >> ronronna-t-elle.

    L'apprentie se détourna.

    << Merci, Plume Dorée, c'est grâce à toi que j'en suis là! Et à Perle d'Ambre. >>

    La guerrière ronronna. Perle d'Ambre avait était un bon mentor pour la jeune guerrière. Elle, Plume Dorée, n'avait fait que la fin de l'apprentissage de Œil de Miel.

    << Je sais que Poil Roux aurait était fier d'elle. miaula Lune de Feu d'un ton sombre.

    - Il l'ai. Il vous observe depuis les rangs de la Tribu des Cieux. la rassura Plume Dorée. >>

    Elle lécha le front de sa sœur, avant de s'éloigner. D'un pas las, le cœur léger, elle se coucha dans sa litière. Avant de fermer les yeux, elle entre-perçut Pelage de Cendre et Tigre Blanc qui se couchaient sur le Rocher Central. Son cœur se serra. Avant, c'était elle et Croc Fauve qui s'installaient là pour manger. Son amie avait encore son compagnon, elle. Croc Fauve lui manquait tant! Les larmes aux yeux, elle s'endormit.

     

    << Plume Dorée! Plume Dorée! >>

    La guerrière dorée ouvrit les yeux. Mais elle ne vit rien. Seul les ténèbres l’accueillirent. Où suis-je? se demanda-t-elle en scrutant les alentours de ses yeux ambrés. Soudain, une voix caverneuse retentit dans l'air. 

    <<Jeune élue. Ton chemin est ardu. Mais n'ai crainte, si ton chemin plonge dans les ténèbres, je sais que ton cœur, lui, veilleras dans la lumière. Bientôt, le véritable danger s'éveilleras. Sois prudente. Courage seras de mise. Tient toi prête. Le destin des tribus repose sur toi. Tu es l'élue. >>

    Le cœur de Plume Dorée battait à tout rompre. Tremblante, de la tête à la queue, elle se dressa fièrement. 

    << Et si je ne veux pas? feula-t-elle. Qui que vous soyez, croyez vous que je veuille tout ceci? Je ne veux pas être l'élue, je ne PEUX pas! Disparaissez! Je ne souhaite qu'être une guerrière loyale à ma tribu, je ne cherche pas la gloire! >>

    Mais nul de répondit. Elle se sentit partir. Elle allait se réveiller.

    << Accepte ton destin! Tu n'a pas le choix! >> rugit encore la voix.

    Et Plume Dorée se réveilla.


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